Contrôle des exportations

Les origines du contrôle des exportations

Date : 3 février 2021

Introduction au contrôle des exportations :

Il est généralement admis que les États-Unis tiennent le rôle précurseur de cette réglementation. En effet, depuis la guerre froide, la superpuissance a pris en compte les enjeux recouvrant la protection de ses données techniques, technologiques et de savoir-faire et s’est dotée d’un arsenal juridique pour contrôler l’exportation de ses informations qu’elles soient tangibles (c’est à dire matérielles et clairement identifiables) ou intangibles (à l’inverse immatérielles et difficilement identifiables comme les logiciels et les données techniques qui s’y rapportent).

 

Toutefois, depuis la naissance des États, des formes basiques de contrôle des exportations ont toujours existé. Par exemple, dès le VIIIe siècle, Charlemagne a interdit l’exportation en dehors de l’empire Carolingien des épées franques, dont l’alliage spécifique d’acier les rendait à la fois légères et très résistantes. Il a même interdit aux forgerons qui maîtrisaient cette technique de voyager en dehors de l’empire. C’est la première occurrence documentée de décision étatique de contrôler l’exportation de produits militaires. Cette interdiction a été confirmée par son petit-fils, Charles II le Chauve, à l’occasion de l’édit de Pistres, en 864. On peut également citer, pendant la guerre d’indépendance des Etats-Unis, le décret britannique de 1774 pris sous le règne du roi George III pour prohiber l’importation d’armes à feu et de poudre à canon en Amérique. Depuis lors, le contrôle des exportations n’a cessé de se développer et de prendre des formes plus abouties.

 

 

Lorsque George Washington a pris le commandement de l’armée continentale en 1775, il n’a obtenu que 40 barils de poudre à canon sur les 400 qui devaient êtres livrés par le Congrès. La difficulté à s’en procurer s’expliquant en partie par l’interdiction britannique de 1774.

 

 

Du point de vue international d’abord, le contrôle des exportations reflète avant tout l’expression de la souveraineté d’un État. Il vise principalement à garantir la sécurité nationale de celui-ci, en s’assurant que les exportations de ses produits militaires ou sensibles ne vont pas, in fine, lui nuire. On l’utilise aussi comme un levier sur le plan de la politique étrangère pour renforcer ou au contraire cristalliser des liens géostratégiques avec d’autres États. Toutefois, le contrôle des exportations, s’il reste très largement une prérogative étatique, fait l’objet de mesures de plus en plus poussées de coordination et d’harmonisation, que ce soit :

  • au niveau de l’Organisation des Nations Unies (Résolution 1540 du 28 avril 2004, Traité sur le Commerce des Armes),
  • au niveau régional (Arrangement de Wassenaar, Groupe Australie, Régime de Contrôle de la Technologie des Missiles, etc.), ou
  • au niveau Européen (Position commune 2008/944/PESC sur l’exportation de produits militaires, Directive 2009/43/PESC sur les Transferts Intra-Communautaires de produits liés à la défense, Règlement 428/2009 sur les biens à double-usage, etc.)

 

Du point de vue de l’entreprise ensuite, le contrôle des exportations présente deux intérêts :

  • En amont, celui de se protéger des agressions extérieures dans le contexte d’une guerre commerciale de plus en plus intrusive. En effet, les réglementations sécurisent les exportations des biens les plus avancés technologiquement et en les respectant l’entreprise protège corrélativement son savoir-faire.
  • En aval, celui d’éviter les pénalités imposées par les États pour non-respect de la réglementation.

 

Auparavant perçu par l’industrie comme une contrainte réglementaire forte, le contrôle des exportations est aujourd’hui considéré au sein des entreprises concernées (monde de la défense, de l’aéronautique, de l’énergie, de l’électronique, etc.) comme un risque, contre lequel il convient de se prémunir en anticipant ses potentielles conséquences. A cette fin, les entreprises ont mis en place des équipes internes dédiées à cette problématique, ont créé des processus, ont inséré des clauses dans leurs contrats de vente ou d’achat, etc. Aujourd’hui, le contrôle des exportations est vu comme un avantage compétitif permettant à une société d’évoluer dans un environnement de plus en plus complexe et juridiquement risqué en toute sécurité, en sachant que les exportations sont réalisées en conformité avec toutes les lois applicables – et donc évitant de graves sanctions pénales ou civiles, qui peuvent aller jusqu’à plusieurs centaines de millions, voire plusieurs milliards d’euros d’amende.